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L’art du pas

L’art du Pas

La marche Méditative

Conférence du vendredi 3 juin 2016 donnée par Jaya Yogācārya en cours de méditation

A l’occasion de la célébration de la journée mondiale du yoga, nous allons organiser un programme spécifique au Centre Jaya dont vous avez déjà probablement pris connaissance. Dans ce programme, nous ferons entre autres une marche méditative,
et les inscriptions sont déjà très nombreuses.
voir le lien ci-dessous :
http://www.centrejaya.org/spip.php?breve193

Je voudrais donc ce soir aborder avec vous, le concept de ce qu’est une marche méditative et quels en sont ses bienfaits.

Les différentes approches de la marche méditative selon les traditions ont toujours fait partie de la pratique spirituelle. La marche méditative est un outil simple mais fantastique.
Qui dit simple ne veut pas dire superficiel. S’aventurer dans la profondeur de la marche méditative, c’est prendre la même direction que celle d’une méditation assise. C’est la quête du soi qui en est l’objectif.

De la même manière qu’il existe de nombreuses façons de méditer (Vipassana, zazen, yogique, transcendantale, pleine conscience, etc.), il existe plusieurs types de marches méditatives.

 La marche zen se pratique dans les dojos zen et se fait toujours en complément d‘une méditation assise sur le principe de 50’ de méditation assise pour 10’ de marche méditative. Le maître zen vietnamien Thich Nhât Hanh enseigne la marche par le souffle. La respiration rythme la marche et l’attention est fixée sur chacun des pas.
C’est une façon de s’ancrer dans le présent et de calmer le mental.
Il s’agit de marcher le plus calmement possible comme si nous étions la personne la plus oisive au monde, ne nous préoccupant pas d’arriver, mais juste du fait de marcher.
Il n’y a pas de regard extérieur. Il s’agit de marcher comme une personne libre et calme.

 La marche kin-hin quant à elle, est issue de la tradition Sôtô. Toujours dans la démarche zen, c’est une marche plus précise. On la compare souvent à celle du tigre sortant de la forêt, tous sens aux aguets. Là, l’attention corporelle est plus grande.
On se soucie de la sensation des pieds sur le sol, l’orientation dans l’espace, la verticalité. La position des mains a son importance. Il y a deux variantes et les mains sont repliées d’une certaine façon sur le plexus solaire. Le jeu des mains, les obligations de direction, la verticalité, l’état intérieur sont donc quelques règles. Là encore, c’est la respiration qui donne le pas et la grande lenteur de la marche.
Cette pratique est reconnue pour être d’un grand bienfait sur le plan psychosomatique
en unifiant le corps et l’esprit. Elle crée une hyper-oxygénation cellulaire et pulmonaire et équilibre les systèmes ortho et parasympathique.

 La marche Vipassana (vipassana signifie ; voir les choses telles qu’elles se présentent) consiste à observer le Soi. On y explore le corps et les sensations qu’il procure. Cela permet de réaliser l’union du corps et de l’esprit et d’en mesurer le
lien. Comme dans la méditation Vipassana, cette marche vise à débarrasser l’esprit des impuretés mentales et à comprendre la nature des sentiments et des racines de la souffrance. Nous sommes dans une pensée bouddhiste.
Dans la marche Vipassana, le principe est d’observer tout ce qui se présente en étant conscient de tous les mouvements successifs depuis le moment où on lève le pied, jusqu’à ce qu’on le repose. C’est un peu comme si on voulait marcher en transportant un bol plein d’eau, sans regarder ses pieds.
C’est une marche plutôt en intérieur, où les mains sont soit dans le dos soit devant soi.
Les yeux sont baissés à 2 m devant soi et sont en unmani mudra, entrouverts mais la conscience est tournée à l’intérieur.
La majorité des marches méditatives adopte ce travail des yeux.
La note mentale est souvent associée au mouvement vipassana par des répétitions intérieures, du style ; debout- debout ; arrêter - arrêter ; tourner - tourner ; marcher - marcher ; pas droit - pas gauche, etc. Pratiquée avant la méditation, elle doit être égale en temps avec la méditation assise.

 La marche de pleine conscience est une déclinaison de la précédente. Une de ses règles par exemple, consiste à prendre conscience des points de contact au moment où le pied se pose et au moment où il se décolle.

 Dans la marche lente du Taï Chi Chuan, l’art de la marche se porte sur le total relâchement du corps dans un déplacement lent et en s’abandonnant à ce déplacement. Durant cette approche, on construit progressivement la conscience de la solidité et de la précision des jambes, tout en laissant une libre expression du haut du corps. Le principe est, ici, d’amener les jambes à réagir au mouvement du bassin dans un équilibre permanent. Ce type d’exercice nécessite une respiration abdominale et un esprit calme. Un transfert du poids du corps peut se faire sur les pas d’appui pendant que l’autre jambe se libère, selon une marche suivant un rail précis. D’autres variantes existent.

 La marche Afgane quant à elle est une marche puissante, de nature plus sportive et permet de parcourir des kilomètres sans essoufflement ni épuisement. C’est le chercheur Stiegler dans les années 80, qui, en Afganistan, observa les chameliers de Kaboul lors des transhumances ou négoces divers.
Ce n’est pas une marche lente, elle est plutôt intense, mais elle impose de rythmer la respiration avec les pas. Cela fixe finalement l’esprit dans une position méditative et se trouve être très bénéfique pour le système nerveux.
Dans ce type de marche, il existe plusieurs tempos de synchronisation pas - respiration. »

 Cela m’amène au Tibet et à vous citer les « loung-gom-pa » que décrit Alexandra David Neel dans son bel ouvrage «  Magiciens du Tibet ". Je le fais afin de mettre un peu de magie dans mon exposé.
« Ma première rencontre avec un loung-gom-pa, dit-elle, eut lieu dans le désert d’herbe au nord du Tibet. Avec mes jumelles, je m’aperçus que sa démarche était singulière et qu’il avançait étrangement vite. Un lama loung-gom-pa accomplit une de ces prodigieuses randonnées dont il est tant parlé au Tibet.
Devant sa curiosité, le compagnon de route d’ A.D.Neel lui dit ceci « Révérende dame, vous n’allez pas arrêter le lama, ni lui parler, n’est-ce pas ? Il en mourrait certainement. »
En effet, l’homme marchait dans un état de transe. Ses yeux largement ouverts, semblaient contempler fixement un point situé quelque part, haut dans l’espace vide. Le lama ne courait point. Il paraissait s’enlever de terre à chacun de ses pas et avancer par bonds, comme s’il avait été doué de l’élasticité d’une balle. Il était vêtu de la robe et de la toge monastique, usuelles, toutes deux passablement râpées. Sa main gauche s’agrippait à un pli de la toge et demeurait à moitié cachée par l’étoffe. Sa main droite tenait un pourba, genre de bâton de pèlerin. En marchant, il remuait légèrement le bras droit, rythmant son pas comme si le pourba, dont la pointe se trouvait fort éloignée du sol, eût été véritablement en contact avec lui et qu’il s’y fût appuyé comme sur une canne » 
A peine passa t-il devant eux , à peine avait il déjà disparu.
« Certains monastères avaient la réputation d’être des centres d’entraînement de loung-gom pa et visaient à obtenir la célérité. Les loung-gom-pa étaient réputés en effet pour parcourir sur plusieurs jours sans s’arrêter des distances inimaginables pour l’homme ordinaire ».
Je referme ma parenthèse magique.

 La marche aux pieds nus, dite parfois la marche Masaï est quant à elle pratiquée depuis des temps immémoriaux. Elle a permis à l’homme de s’ancrer et de travailler sa verticalité corporelle. L’obligeant à s’adapter à des sols irréguliers, soit mous, soit durs, soit en dénivelés, elle lui a permis de développer la conscience du réajustement plantaire permanent donnant la belle verticalité et un port de tête fier et noble qu’ont certaines tribus. L’art de dérouler le pied et la sollicitation des points énergétiques de la plante a des vertus incontestables que l’on connaît par l’acupression plantaire et la réflexologie.
Les bienfaits de la marche en général, quelle qu’elle soit, passe par le bon déroulement du pied du talon à la pointe.

Nos occidentaux qui marchent rarement pieds nus en sont arrivés à créer avec ingénierie, la chaussure qui rappelle les conditions de la marche pieds nus pour obliger le pied au réajustement permanent. Quand ce ne sont pas les chaussures connectées...Marketing !

Il nous reste à présent les marches contemplatives, voire la Marche de Vision.
Relevant du chamanisme en général qu’il soit Védique, tantrique, Boudhique, ou des traditions Amérindiennes, voire des traditions Toltèques, elles sont tout aussi importantes et donnent la place à la dimension de l’esprit.
Dans cette catégorie, la marche de Vision développée par Brandt Morgan, initié lui même par Don Miguel Ruiz, est une approche simplifiée des rites des quêtes de vision des rituels Amérindiens de jeûne et de prière qui durent 4 nuits et 4 jours.

« Le rite, nous décrit-il, consiste à s’immerger en solitaire dans la nature, dans un cercle de trois mètres de diamètre. Durant ce temps de solitude, la danse, la méditation, les postures, la contemplation, le jeûne, permettent de débrancher le corps et le mental des conditionnements nombreux afin que le vrai Moi redécouvre les liens avec la nature profonde. A ce moment-là, le langage du cœur prend le dessus et l’être devient un tout, relié au tout. A ce moment-là, sont alors données les réponses aux questions les plus importantes."

N’oublions pas que lorsque nous voulons une réponse à nos questionnements mentaux, nous nous levons et nous marchons bien souvent.

La marche de vision, beaucoup plus courte bien sûr que la quête de vision, répond à la même démarche.
En voici son déroulement.
 Méditer profondément sa question au préalable - s’immerger dans la nature - débrancher le corps et l’esprit - marcher - poser sa question d’une certaine façon à l’univers - marcher ensuite de façon libre et contemplative - attendre la réponse.
Cette réponse subtile de la nature se manifestera par des signes qu’il faut apprendre à lire, à observer, à remarquer, à interpréter. Enfin, et surtout, ne pas oublier de Remercier.
Tout est là ! Tout est parfait. »

Nous pourrions parler encore très longtemps des bienfaits physiologiques et mentaux des marches méditatives. Vous qui êtes pratiquants de yoga, nul besoin de vous convaincre. Vous connaissez déjà les bienfaits des techniques posturales, respiratoires et méditatives.
Je vous invite donc à venir expérimenter avec nous, bientôt, dans le partage et le silence, l’écoute de cette nature qui est en nous et dans laquelle nous sommes.
Hari om tat sat
Jaya Yogācārya

Bibliographie :
 « Régénération par la marche Afgane » de Edouard G.Stiegler aux edts Tredaniel
 « Eloge de la marche tranquille « de Marc Lestalou aux edts d’Art et d’Ailleurs
 « La Marche de vison « de Brandt Morgan aux edts Jouvence
 adaptation et commentaire de Jaya Yogacharya

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